lundi 28 novembre 2011

TERRORISME : le Mali, la grande victime

es terroristes auteurs des enlèvements de la semaine dernière au Mali, qui qu’ils soient, viennent d’administrer à ce pays un coup très dur. Tout d’abord parce que les accusations selon lesquelles les autorités maliennes font montre d’une certaine fébrilité dans le combat contre le terrorisme et la criminalité dans la région sahélienne, sont quelque peu confirmées avec ces prises d’otages, qui ont toutes été perpétrées sur son sol. Mais surtout, le caractère massif des enlèvements ayant inquiété le reste des touristes, c’est l’économie malienne pour laquelle les recettes touristiques générées par la région nord du pays, sont importantes, qui risque d’être davantage affaiblie. Des constats suffisamment évocateurs pour que la bataille contre le terrorisme dans cette partie du continent africain soit livrée avec la dernière énergie.

Le Mali doit aujourd’hui être quelque peu gêné. Plus d’une fois, les autorités de ce pays avaient fait preuve d’une certaine vexation, quand leurs voisins algériens notamment, persistaient à dire que ''le Mali était le ventre mou de la lutte anti-terroriste au Sahel''. Mais avec cinq prises d’otages et un mort perpétré sur son sol, Bamako ne peut plus continuer à faire comme si de rien n’était. Elle ne peut pas non plus continuer à prétendre qu’elle use de tous les moyens pour éradiquer le terrorisme dans sa circonscription territoriale. Sa meilleure défense serait d’avouer sa relative impuissance et d’exiger de l’aide.

Le Mali doit d’autant plus se monter réaliste que son image est en jeu. Et son économie avec. Ce qui s’est passé la semaine dernière à Tombouctou ne rassurant personne quant au déplacement dans le nord du pays. D’ailleurs, les premières conséquences n’ont pas tardé. Les quelques touristes qui y avaient campé ont été obligés de quitter. Et c’est en cela que les terroristes semblent avoir réalisé un gros coup. D’abord, cinq otages, c’est un joli ''butin de guerre''. En voilà une source potentielle de devises. De quoi réapprovisionner l’armurerie et convaincre d’autres djihadistes. Et se montrer encore plus forts.
Naturellement, les recherches pour retrouver les otages sont entreprises, aussi bien par le Mali que par les pays dont les ressortissants ont été enlevés. C’est ainsi que des moyens militaires et des soldats français ont été très tôt déployés dans la zone. S’il faut croiser les bras pour que toutes ces initiatives aboutissent, il faut néanmoins implorer la prudence et le tact des uns et des autres.
On se rappelle que c’est de cette manière que d’autres otages français avaient été pris au piège par les combats entre soldats français et terroristes venant du Niger, en début d’année. Une telle coincidence serait d’autant plus regrettable que l’expérience devrait servir à quelque chose.

Si la force ne réussit pas, on peut toujours compter sur les négociations. On a même l’impression que c’est la voie privilégiée des terroristes. L’essentiel étant que les proches des otages puissent les retrouver, sains et saufs.

Boubacar Sanso Barry pour GuineeConakry.info

L’Afrique de Fatoumata Diawara

Sa voix sort d’une longue lignée ancestrale, surgit d’un continent qui sait préserver le bonheur. La musique de Fatoumata Diawara envoûte. Conteuse, musicienne, parolière, interprète née en Côte d’Ivoire, elle a grandi au Mali, vit en France, et fait entendre son chant, guitare rythmique en main, sur des mélodies blues de la tradition wassoulou, y mêlant jazz, funk et folk.

Voix langoureuse, sensuelle et de révolte, pour porter au-delà des frontières de l’Afrique un message fiévreux (contre l’excision ou l’abandon des enfants), l’urgence du retour à la sagesse, la solidarité avec ses sœurs maltraitées et leurs fils perdus.

Que chante-t-elle en bambara ? Sa solitude, après sa première dispute avec son bien-aimé qui avait tari la source de tendresse de ses mains sur ses cheveux, son cou, sa taille et rendu ses yeux sans regard. La supplication adressée aux mères démunies de ne plus donner leurs propres enfants à élever par d’autres. L’humiliation et la tristesse provoquées par les moqueries, le mal que peuvent faire des paroles blessantes.

Un appel à l’unité des femmes pour qu’elles demandent aux chefs d’État de ne plus se lancer dans des guerres qui tuent fils, frères, fiancés et maris. Son soutien et son admiration pour la chanteuse malienne Oumou Sangaré, que Fatoumata Diawara enveloppe de sa musique tel un châle posé sur des épaules.

VIBRANT PLAIDOYER POUR LA DIFFÉRENCE

Elle lance aussi un vibrant plaidoyer pour la différence « qui n’est pas une maladie » , ou comment accepter un enfant qui n’est pas comme les autres sans penser qu’il est « possédé par les mauvais esprits » . DansAlama , elle fait entendre les accents autobiographiques d’une enfance qui« se confiait au feu, à l’eau, et au souffle du vent », ses seuls amis. Le drame et la malédiction des femmes, libres et fières, qui refusent les mariages forcés mais se choisissent des hommes incapables d’aimer.

Dans ses chansons, Fatoumata Diawara demande à ses sœurs africaines de ne jamais perdre confiance en elles, de ne pas se sous-estimer ni se laisser affaiblir. Elles sont la clé de voûte du groupe, de la société. Par elles, la généalogie et la transmission. Et malheur à celle qui rejette les leçons des générations qui la précèdent. À chacune de savoir reconnaître« l’âme que nous croisons chaque jour et qui nous guide ».

Fatoumata Diawara entonne, en guise de final, un hymne déchirant à la dignité des clandestins, ces hommes de l’aventure , dignes héritiers des nomades, dont personne ne veut, morts en route, au bout de leur chemin de larmes.

Fatou , de Fatou Diawara. CD World Circuit. En concert au New Morning (Paris), le 29 novembre.

Jean-Claude Raspiengeas